Premières preuves de la préservation de surfaces dévoniennes en Afrique du sud-est : nouveaux apports de la datation de cuirasses latéritiques
Abstract
Environ 70% du relief émergé terrestre est caractérisé par des surfaces érosives
possédant un faible gradient topographique, aussi appelées surfaces d’aplanissement.
Certains géomorphologues défendent l’idée que ces surfaces sont des reliques d’anciens
paléoreliefs, partiellement préservés des phénomènes d’érosion durant des dizaines de
millions d’années. Une telle préservation en ferait les témoins privilégiés de l’évolution
des surfaces continentales, depuis la formation de ces surfaces jusqu’à nos jours.
Certaines des plus hautes surfaces d’aplanissement d’Afrique, localisées à plus de 2000
m d’altitude, sont considérées dans la littérature comme étant des reliques d’une
surface Mésozoïque, la Gondwana surface (King, 1962). En particulier, le plateau de
Nyika (ca 2200 a.s.l.), localisé au nord du Malawi, est l’une des plus importantes
reliques potentielles de cette paléosurface. Toutefois, la possibilité de préserver des
reliefs aussi anciens est un sujet débattu dans la littérature, particulièrement sous un
climat tropical.
L’exploration de ce plateau a permis d’identifier un niveau de cuirasse détritique,
aujourd’hui sur un haut-topographique. Cette cuirasse, composé de clastes d’une
cuirasse primaire riche en hématite cimentés par une matrice goethitique, a été daté
grâce à la méthodologie de datation (U-Th)/He des oxydes et hydroxydes de fer.
L’analyse minéralogique et géochimique de grains en provenance des clastes
hématiques révèle la complexité de ces zones, qui sont pour la plupart composées d’un
mélange de générations d’oxydes de fer. La datation de cette cuirasse a toutefois permis
de faire ressortir que sa matrice possède un âge Quaternaire. A contrario, certains
clastes préservés, peu impactés par les phénomènes de dissolution/recristallisation à
l’origine des mélanges générationnels, possèdent des âges remontant au Dévonien.
La topographie initiale du plateau n’a pas été préservée, des bancs de cuirasses
détritiques se retrouvant aujourd’hui sur des hauts topographiques. Toutefois, ces
résultats montrent que des cuirasses détritiques se sont développés sur cette surface, ou
sur une surface supérieure adjacente, au cours du Dévonien avant d’être érodées pour
permettre de former les cuirasses aujourd’hui en surface. Par ailleurs, cette étude tend
à supporter l’idée que le cuirassement des plateaux en contexte tropical joue un rôle clé
dans leur préservation.