La semelle métamorphique d’Oman : témoin de la dynamique précoce des zones de subduction
Abstract
Les semelles métamorphiques sont des unités d’origine
océanique situées à la base des grandes ophiolites obductées. Ces
unités, d’une épaisseur maximale de 500 m environ, sont caractérisées
par un gradient métamorphique inverse, dans laquelle les
conditions de pression (P) et de température (T) de cristallisation
augmentent vers le contact avec l‘ophiolite sus-jacente depuis
500±100C et 0.5±0.2 GPa jusqu’à 800±100C et 1.0±0.2 GPa.
Contrairement aux péridotites des ophiolites, les assemblages
minéralogiques des semelles métamorphiques se prêtent bien à
la radiochronologie (méta-pélites et plagiogranites), et les âges
obtenus suggèrent que la formation puis l’accrétion des semelles
métamorphiques a lieu au cours des 2 Ma suivant l’initiation
d’une zone de subduction intra-océanique. Les semelles métamorphiques
fournissent donc des contraintes majeures sur la dynamique
précoce des zones de subduction océaniques (structure
thermique, rhéologie effective le long de l‘interface de subduction
naissante), leur déformation et métamorphisme haute température
étant en général expliqués par le transfert de chaleur depuis le
manteau de la plaque supérieure vers l’unité en cours d’accrétion.
Cette étude s’attache à préciser la structure et les conditions
P-T de formation de la semelle métamorphique d’Oman, afin
de contraindre les processus d’accrétion des semelles métamorphiques
et l’exhumation des massifs ophiolitiques, ainsi que la
dynamique de l’interface de subduction. De nombreux auteurs
évoquent l’existence, au travers de la semelle, d’un gradient thermique
continu très fort (~400C/100m), symptomatique d’un métamorphisme
de contact, sans toutefois rendre compte du gradient
inverse de pression. Au terme d’une étude pétrologique et
structurale détaillée, nous proposons un modèle dans lequel la
semelle métamorphique résulte d’épisodes multiples d’accrétion
d’unités homogènes en température (donc sans gradient apparent)
au cours des premières étapes de subduction intra-océanique. Ceci
implique qu’à chaque étape d’accrétion, l’interface de subduction
s’est éloignée de la future ophiolite obductée. Nous proposons que
ces sauts résultent de changements majeurs dans la distribution
de la déformation, du fait 1) des variations des propriétés mécaniques
des roches à l’interface de subduction lors de son équilibration
thermique et 2) de l’augmentation au cours du temps de
la proportion de roches sédimentaires entrant en subduction. Ce
nouveau modèle rend compte d’une grande complexité thermique
et mécanique lors de la dynamique précoce de l’interface de subduction,
pas suffisamment examinée dans les études numériques
actuelles.